I - L'histoire de la justice
La justice, de la Révolution à nos jours
Fondements et principes
Les symboles de la justice
II - Le fonctionnement de la justice
L'ordre judiciaire
Les juridictions civiles
Les juridictions pénales
Les juridictions judiciaires spécialisées en matière civile
Les juridictions d'outre-mer
Les juridictions pour mineurs
La cour d'appel
La Cour de cassation
L'ordre administratif
Le tribunal administratif
Les juridictions administratives spécialisées
La cour administrative d'appel
Le Conseil d'État
Le Tribunal des conflits
III - Les gens de justice
Les magistrats du siège
Les magistrats du parquet
Le personnel de greffe
Les juges non-professionnels
Les magistrats administratifs
La justice, de la Révolution à nos jours
Guidés par l’esprit des Lumières, les révolutionnaires élaborent La Déclaration des droits de l’homme et du citoyen est votée le 26 août 1789. Ils mettent fin à la torture, imposent la présomption d’innocence et posent les principes de non-rétroactivité des lois pénales et de proportionnalité des peines.
La loi des 16 et 24 août 1790 instaure un droit d’appel et pose notamment le principe d’égalité devant la justice et de séparation entre les deux ordres de juridiction (administratif et judiciaire). Il y a deux degrés de justice civile.
Au premier échelon, est institué le juge de paix dont le rôle consiste avant tout à concilier les adversaires dans les litiges de la vie quotidienne. Au-dessus du juge de paix, siège le tribunal de district faisant office de juge d’appel.
L’appel des décisions des tribunaux de district est confié à un tribunal de district voisin, choisi par les parties.
Quant à l’organisation de la justice pénale, elle dépend de la gravité de l’infraction.
Dans chaque commune est institué un tribunal de police municipal, chargé de juger les infractions les moins graves.
Un tribunal de police correctionnel, chargé de juger les infractions d’une gravité moyenne, est créé au niveau du canton.
Un tribunal criminel, chargé de juger les crimes et délits les plus graves, est installé au chef-lieu du département. Cette dernière institution, à l’origine de la cour d’assises, est composée de magistrats et d’un jury populaire de citoyens tirés au sort.
Des tribunaux d’appel ainsi qu’un tribunal de cassation sont également institués. Créé pour assurer le respect de la loi et l’unité de la jurisprudence, le tribunal de cassation ne dispose pas, à l’époque, des attributions aujourd’hui dévolues à la Cour de cassation.
Sous l’Ancien Régime, le droit criminel, soumis à l’arbitraire du juge ou du père, permettait de condamner un enfant à mort, à la prison à vie ou à la déportation.
En 1791, le premier code pénal créé une justice des mineurs posant le principe de « discernement », c’est-à-dire la conscience, au moment des faits, du caractère condamnable des actes commis.
Napoléon Bonaparte, sacré empereur des Français en 1804, est à l’origine d’importantes créations sur le plan des institutions et du droit.
C’est à lui que l’on doit :
• Le Code civil ou « Code Napoléon » (1804),
• Le Code de procédure civile (1806),
• Le Code de commerce (1807),
• Le Code d’instruction criminelle (1808),
• Le Code pénal (1810).
Les juges ne sont plus élus mais nommés par le Gouvernement et l’organisation de la justice civile est rénovée. Au niveau du canton, les juges de paix sont maintenus et conservent leur rôle d’arbitrage et de conciliation.
Au-dessus, dans chaque arrondissement, siège un tribunal civil. Au niveau supérieur, figurent les tribunaux d’appel, devenus en 1804 les cours d’appel (en moyenne une pour trois départements).
Au sommet, est placé le tribunal de cassation. Cette institution, qui prendra en 1804 le nom de Cour de cassation, conserve ses attributions juridictionnelles de l’époque révolutionnaire et dispose d’une compétence disciplinaire sur l’ensemble du corps judiciaire. Le Code d’instruction criminelle fixe les principes de la procédure pénale et les règles du procès.
Le ministère public joue désormais un rôle décisif dans la mise en mouvement de l’action publique :
Il a pour mission d’identifier et de poursuivre les auteurs d’infractions devant une juridiction.
L’instruction est confiée au juge d’instruction.
Ce magistrat est chargé de mener l’enquête sur les faits dont il est saisi, en général les plus graves ou complexes. Les tribunaux criminels sont remplacés par des cours d’assises (une par département).
Le droit pénal définit et répartit les infractions en trois catégories (contraventions, délits et crimes), fixe l’échelle des peines applicables aux infractions et crée des circonstances atténuantes et aggravantes.
L’organisation est complétée par des juridictions spécialisées (tribunaux des prud’hommes, tribunaux de commerce…) chargées de juger certains types d’affaires.
La période, marquée par la centralisation de l’État, se caractérise également par la création d’un Conseil d’État sous sa forme actuelle.
En 1810, les peines de prison sont divisées par deux pour les mineurs jugés capables de discernement, par rapport à celles infligées aux majeurs.
De la chute de Napoléon jusqu’au milieu du XXe siècle, l’organisation des juridictions de l’ordre judiciaire ne connaît pas de profond bouleversement.
Néanmoins, on assiste à la consécration progressive d’un ordre administratif avec des structures juridictionnelles modelées à l’image des institutions judiciaires.
LA JUSTICE SOUS LA Ve RÉPUBLIQUE
Des changements importants interviennent en 1958 avec l’arrivée au pouvoir du général de Gaulle. La carte judiciaire est révisée.
La réforme prend en compte les modifications démographiques, l’amélioration des conditions de transport, des moyens de communication et de l’activité judiciaire.
Ainsi, de nouvelles cours d’appel sont créées en raison de l’activité judiciaire croissante de certains départements.
Les institutions judiciaires sont rénovées. La réforme accroît la compétence de la cour d’appel ; celle-ci examine désormais les recours formés contre les décisions rendues par l’ensemble des juridictions de première instance.
Les juges de paix sont par ailleurs remplacés par le tribunal d’instance (un par arrondissement).
Le tribunal de grande instance succède au tribunal civil au siège du département.
En 1981, l’élection de François Mitterrand ouvre la voie à l’abolition de la peine de mort. Portée par le garde des Sceaux Robert Badinter, la loi portant abolition de la peine mort en France est adoptée le 18 septembre par l’Assemblée nationale et le 30 septembre par le Sénat.
Elle est promulguée le 9 octobre 1981 portant abolition de la peine de mort.
Le tribunal d’instance et le tribunal de grande instance ont fusionné en 2020 pour devenir le tribunal judiciaire.
Fondements et principes
Afin que les citoyens puissent vivre ensemble, des règles organisent la vie en société. C’est le droit. Le rôle de la justice est de faire en sorte que tout le monde le respecte. Le droit provient de différentes sources. La justice se fonde sur des grands principes qui guident son fonctionnement. Elle est incarnée à travers différents symboles.
Le rôle de la justice
La justice est à la fois un idéal philosophique, une activité et une institution. Son rôle est de préserver la vie en société. À ce titre, la justice assure trois missions :
- Protéger les plus vulnérables ;
- Juger les conflits ;
- Sanctionner les comportements interdits.
L’indépendance
Trois pouvoirs coexistent au sein de l’État :
- le pouvoir législatif : c’est le Parlement (Assemblée nationale et Sénat) qui vote les lois,
- le pouvoir exécutif : c’est le Gouvernement qui exécute les lois,
- le pouvoir judiciaire : c’est l’autorité judiciaire qui contrôle l’application des lois.
La gratuité
Le deuxième grand principe de fonctionnement de la Justice est sa gratuité. C’est en effet l'État qui rémunère les magistrats.
Les justiciables doivent toutefois prendre à leur charge les frais de justice. Ces derniers sont liés aux coûts de procédure et aux honoraires des avocats.
Les personnes sans ressources, ou dont les ressources sont modestes, peuvent être exonérées des frais de justice et demander à bénéficier de l'aide juridictionnelle. C’est alors l'État qui prend en charge les frais de justice, en totalité ou en partie.
Le droit de faire appel
Le droit de faire appel des décisions de justice permet au justiciable de demander le réexamen de son affaire. Ce sont alors des magistrats différents du premier procès, et siégeant dans un autre tribunal ou une autre cour de justice, qui se saisissent de l’affaire. Ils rendent une deuxième décision de justice, qui annule la première.
Le droit à un procès équitable
L’organisation d’un procès est, elle aussi, conditionnée au respect de certaines règles d’équité : avoir accès à un tribunal indépendant et impartial, statuant selon une procédure contradictoire et dans un délai raisonnable ; avoir le droit à un procès public, respectueux de l’égalité des armes et des droits de la défense.
Tous les citoyens doivent donc pouvoir bénéficier des mêmes droits.
La présomption d'innocence
La présomption d’innocence signifie qu’un individu ne peut pas être déclaré coupable tant qu’il n’a pas été définitivement jugé.
Concrètement, il est par exemple interdit de diffuser les images d’un individu menotté si celui-ci n’a pas donné son accord. Toute personne présentée comme coupable dans la presse peut également obtenir une rectification publique.
Le principe du contradictoire
Le principe du contradictoire signifie que toute partie ne peut être jugée qu’après avoir été entendue ou appelée, et que tout élément produit en justice doit avoir été communiqué à l’avance à l’adversaire.
Il garantit à chacune des parties le droit de consulter les dossiers qui le concernent et de préparer ainsi sa défense avec son avocat.
La publicité
La publicité est le troisième principe de fonctionnement de la Justice. Les audiences doivent être rendues en public et être accessibles à tous. Ce principe va de pair avec ceux de permanence et de fixité.
Sauf exceptions (notamment pour les mineurs), les procès doivent avoir lieu en public. En pratique, cela signifie que les salles d’audience sont accessibles à tous. Les journalistes possèdent un libre accès aux salles d’audience mais ne peuvent pas enregistrer les débats sauf sur autorisation spéciale.
Les symboles de la justice
Les symboles de la justice trouvent leur origine aussi bien dans la mythologie grecque que dans le christianisme. Thémis, déesse de la justice, est le symbole le plus connu. Il en existe plusieurs autres, comme les Tables de la loi ou la main de Justice.
Thémis, déesse de la justice
Fille d'Ouranos (le ciel) et de Gaïa (la terre), Thémis est une déesse grecque. Justitia est son équivalent dans la mythologie romaine.
Deuxième épouse de Zeus, Thémis est également sa conseillère. Elle représente la justice, l’équité et l’ordre. Elle préserve la bonne entente entre les dieux et a le don de prédire l'avenir.
Elle est représentée avec un bandeau sur les yeux, une balance dans une main et une épée (ou un glaive) dans l’autre.
Le bandeau sur les yeux
Le bandeau sur les yeux représente l’impartialité. La justice, les yeux bandés, ne voit pas les accusés. Elle peut ainsi décider en toute objectivité.
La balance
Le symbole de la balance est l’un des plus anciens de la Justice. La religion égyptienne, puis la tradition chrétienne, font de la balance l’instrument de la pesée des âmes et des actes.
La balance représente l’équité. Lors de la pesée symbolique des décisions de justice, si les deux plateaux sont à l’équilibre, on considère que ces décisions ont été rendues de façon équitable.
La balance représente également l’équilibre, la prudence et l’harmonie. Ces notions forment la base de la vie en société, que la Justice est chargée de préserver.
Le glaive (ou l’épée)
Le glaive symbolise l’aspect répressif de la Justice. Il rappelle que le rôle de l’institution judiciaire est également de sanctionner.
Dans la mythologie grecque, l’épée est le symbole de Némésis, déesse de la vengeance. Dans le monde romain, elle est remplacée par le glaive à double tranchant de la Légion incarnant l’impartialité de la Justice. Ce symbole de puissance rappelle que la Justice n’est rien sans la force qui permet de la faire appliquer. L’épée est ainsi complémentaire de la balance.
Les autres symboles
D’autres symboles de la justice existent. Ils ne sont pas associés à la déesse Thémis. Moins connus, ils sont tout aussi anciens.
Les Tables de la Loi
Les Tables de la Loi apparaissent dans la Bible (Ancien Testament). Ce sont les tables en pierre sur lesquelles Dieu aurait gravé les dix commandements remis à Moïse.
Contrairement aux autres symboles liés à la religion chrétienne, les Tables de la Loi sont conservées lors de la Révolution française en raison de leur forte symbolique. La Déclaration des droits de l’homme et du citoyen de 1789 adopte ainsi la forme des tables. Elles ornent aujourd'hui encore la plupart des édifices de la Justice en France.
Elles symbolisent la primauté du droit et une loi juste et égale pour tous.
Le genou dénudé
Dans l’Antiquité, le genou incarne la magnanimité. Pour appeler au secours ou implorer la pitié, la coutume consistait à enlacer les genoux des puissants pour solliciter leur indulgence.
Cette symbolique est réactualisée à la Renaissance et prend un véritable essor sous la monarchie des XVIe et XVIIe siècles. Durant cette période, les souverains tels que Louis XIV sont représentés avec une jambe découverte pour exprimer la mansuétude royale.
Le genou dénudé symbolise la clémence de la Justice.
La main de Justice
Jusqu’en 1792, la main de Justice est un attribut du pouvoir royal. Sa forme reprend le geste de bénédiction du Christ. La main de justice montre que le roi rend la justice au nom de Dieu mais qu’il est également la source même de la justice.
Ce symbole exprime la place centrale de la Justice dans l’exercice du pouvoir autant que sa nécessité.
De nouveaux symboles
Parmi les symboles modernes associés à la Justice, certains ont trait au protocole et d’autres à l’architecture.
Ainsi, le serment prononcé par les magistrats peut être considéré comme l’un des symboles modernes de la Justice, de même que les robes d’audience, facilement reconnaissables.
Les palais de justice et salles d’audience rappellent également certaines valeurs associées à la justice : solennité, ouverture et transparence.
Le marteau est parfois associé au pouvoir de décision du juge. Il s’agit cependant d’un symbole repris des pays anglo-saxons. En France, seuls les commissaires-priseurs sont autorisés à utiliser le marteau lors des ventes aux enchères publiques.