Les relations du Gouvernement avec les autres institutions

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V-X
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Quelles sont les relations entre le Gouvernement et le président de la République ?

Les modalités de la relation, fixées par la Constitution

La Constitution du 4 octobre 1958 attribue des rôles distincts au Gouvernement et au président de la République :
  • en plus de son rôle de chef des armées (article 15), le président de la République a un rôle d'arbitre : "il assure, par son arbitrage, le fonctionnement régulier des pouvoirs publics ainsi que la continuité de l'État." (article 5) ;
  • tandis que "le Gouvernement détermine et conduit la politique de la Nation" (article 20) et que le Premier ministre est responsable de la défense nationale (article 21).
Malgré ces attributions en apparence distinctes, qui supposeraient une certaine autonomie du Gouvernement vis-à-vis du chef de l'État, la Constitution attribue au président de la République de nombreux pouvoirs lui permettant d'influencer les politiques publiques :
  • le président de la République nomme les ministres : il choisit le chef du Gouvernement en premier, puis les autres membres du Gouvernement sur proposition du Premier ministre (article 8) ;
  • le chef de l’État préside le Conseil des ministres, dont il fixe l’ordre du jour, sur proposition du Premier ministre. La signature du président de la République doit être apposée au bas des décrets et des ordonnances délibérées en Conseil des ministres ;
  • en cas d’empêchement ou de décès du président, l’intérim est assuré par le président du Sénat. Le Gouvernement arrive en second plan, dans l'hypothèse (encore jamais réalisée) où le président du Sénat ne pourrait pas assurer l'intérim.

La pratique institutionnelle

Dans le cas où les majorités présidentielle et parlementaire sont identiques, le président de la République dispose des moyens nécessaires pour étendre son domaine de d'action quitte à limiter les pouvoirs du Gouvernement :
  • en s'adressant lui-même aux ministres, sans passer par le Premier ministre ;
  • en sollicitant la démission du Premier ministre (comme ce fut le cas pour Jacques Chaban-Delmas en 1972 ou Michel Rocard en 1991).
En réalité, ce n'est qu'en cas de cohabitation (lorsqu'une majorité parlementaire, différente de la majorité présidentielle, est élue) que les rôles de chacun sont strictement respectés :
  • le président de la République est contraint de choisir un Premier ministre issu de la majorité parlementaire ;
  • ce dernier peut imposer la nomination de ministres issus de son parti politique au Gouvernement, y compris à des postes stratégiques ;
  • le Gouvernement conduit la politique de la Nation mais le président peut refuser de signer des ordonnances ou décrets en Conseil des ministres.
Essentiel
  • La Constitution fixe à la fois les rôles et les modalités de la relation entre le président de la République et le Gouvernement.
  • Les compétences du président de la République sont énumérées dans la Constitution. Son rôle d'arbitre et de garant du fonctionnement des pouvoirs publics et de la continuité de l'État l'amène à interagir avec le Gouvernement qui, pour sa part, détermine et conduit la politique de la Nation.
  • Dans la pratique, cette séparation des prérogatives entre l'un et l'autre est constamment amenée à évoluer. Hors période de cohabitation, le président de la République a de nombreux moyens de contrôle et d'influence sur l'action menée par le Gouvernement.
"Ceux qui échouent trouvent des excuses, ceux qui réussissent trouvent les moyens
Quand un homme a faim, mieux vaut lui apprendre à pêcher que de lui donner un poisson.
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V-X
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Quels sont les rapports entre le Gouvernement et le Parlement ?
Ce sont d’abord des rapports de collaboration dans le cadre de l’élaboration de la loi. Le rôle du Gouvernement est important, car il est à l’origine de la majorité des lois promulguées.

Le parlementarisme rationalisé

La collaboration entre le Gouvernement et le Parlement s’effectue par le biais d’un ensemble de moyens juridiques permettant au Gouvernement de mener à bien les réformes qui lui paraissent nécessaires sans en être empêché par le Parlement. La révision constitutionnelle de 2008 a toutefois redonné d’importants pouvoirs au Parlement afin d’atténuer le déséquilibre qui peu à peu s’était installé au profit de l’exécutif.

Désormais :
  • les assemblées ont la maîtrise de la moitié de leur ordre du jour ;
  • les Conférences des présidents des deux assemblées peuvent conjointement s’opposer au déclenchement de la procédure accélérée de vote d’un texte par le Gouvernement ;
  • quant au Gouvernement, en plus des lois de finances et lois de financement de la sécurité sociale, il ne peut recourir à la procédure de article 49.3 de la Constitution que pour un seul texte de son choix par session.

La responsabilité du Gouvernement devant le Parlement

Le Parlement contrôle l’action du Gouvernement par l’intermédiaire des commissions permanentes, qui auditionnent les membres du Gouvernement, et peuvent mettre en place des missions d’information sur des sujets précis. Il peut également créer des commissions d’enquêtes afin de mener des investigations plus poussées. La commission des finances joue pour sa part un rôle central dans le contrôle de l’efficacité de la dépense publique, qui a encore été renforcé depuis la loi organique du 1er août 2001 relative aux lois de finances.

Le contrôle du Parlement s’exerce aussi par la possibilité de mettre en cause la responsabilité du Gouvernement devant l’Assemblée nationale selon trois modalités (art. 49) :
  • lorsque le Gouvernement pose une question de confiance sur son programme ou une déclaration de politique générale : en cas de réponse négative à la majorité absolue des suffrages exprimés, le Gouvernement doit démissionner ;
  • par le dépôt d’une motion de censure par un dixième des députés adoptée à la majorité absolue des membres de l’Assemblée : le Gouvernement est alors renversé ;
  • lorsque le Gouvernement applique l’article 49.3 de la Constitution. Les députés peuvent déposer dans les 24 heures et voter une motion de censure pour s’opposer à l’adoption d’un texte sans vote. Dans ce cas, le Gouvernement est également conduit à démissionner.
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Le recours à l'article 49.3 de la Constitution : dans quels cas ?

Quelle est la procédure ?

L'article 49.3 de la Constitution donne la possibilité au Premier ministre, après délibération du Conseil des ministres, d’engager la responsabilité du Gouvernement sur le vote :
  • d’un projet de loi de finances ;
  • d'un projet de loi de financement de la sécurité sociale ;
  • d’un autre projet ou une proposition de loi en débat à l’Assemblée nationale.
Si le Premier ministre décide d’y recourir, sa décision entraîne la suspension immédiate de la discussion du projet de loi. Le texte est considéré comme adopté, sans être soumis au vote, sauf si une motion de censure est déposée dans les 24 heures qui suivent.

La motion de censure doit être votée selon des conditions très précises : seuls sont recensés les votes favorables à la motion de censure qui ne peut être adoptée qu’à la majorité des membres composant l’Assemblée. Si la motion de censure est adoptée, le texte est rejeté et le Gouvernement est renversé.

Depuis la réforme constitutionnelle du 23 juillet 2008, hors projets de loi de finances ou de financement de la sécurité sociale, l’article 49.3 ne peut être utilisé que sur un seul texte au cours d’une même session parlementaire . Avant cette révision de la Constitution, le gouvernement pouvait y avoir recours aussi souvent qu’il le voulait et sur n’importe quel texte.

Dans sa décision du 14 décembre 2023, le Conseil constitutionnel apporte deux précisions quant à l'usage du 49.3 :
  1. le Premier ministre peut, en son absence, charger un ministre d'informer l'Assemblée nationale de sa décision d'engager la responsabilité du Gouvernement sur un texte ;
  2. il est possible d'engager la responsabilité du Gouvernement sur un texte même si la responsabilité a été déjà engagée dans des sessions précédentes.
Information
Actualité du 49.3

Sous la XVIe législature, la Première ministre Élisabeth Borne a eu recours au 49.3 à 11 occasions lors de la session 2022-2023. Depuis septembre 2023 (session extraordinaire et session 2023-2024), elle y a eu recours 12 fois (au 20 décembre 2023) :
  • le 19 décembre 2023 sur le projet de loi de finances pour 2024 en lecture définitive ;
  • le 16 décembre 2023 sur la deuxième partie et l'ensemble du projet de loi de finances pour 2024 ;
  • le 14 décembre 2023 sur la première partie du projet de loi de finances pour 2024 en nouvelle lecture ;
  • le 1er décembre 2023 sur le projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2024 en lecture définitive ;
  • le 26 novembre 2023 sur la troisième partie et l'ensemble du projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2024 ;
  • le 23 novembre 2023 sur la deuxième partie du projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2024 (nouvelle lecture) ;
  • le 13 novembre 2023 sur le projet de loi de programmation des finances publiques pour les années 2023 à 2027 (la déclaration engageant la responsabilité du gouvernement a été lue par Franck Riester, ministre des relations avec le Parlement, en l'absence de la Première ministre) ;
  • le 7 novembre 2023 sur la deuxième partie et l'ensemble du projet de loi de finances pour 2004 ;
  • le 30 octobre 2023 sur la troisième partie et l'ensemble du projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2024 ;
  • le 25 octobre 2023 sur la partie recettes du projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2024 ;
  • le 18 octobre 2023 sur la première partie du projet de loi de finances pour 2024 ;
  • le 27 septembre 2023 sur le projet de loi de programmation des finances publiques pour les années 2023 à 2027.

Quelle utilisation du 49.3 depuis 1958 ?
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Essentiel
Pour faire adopter un texte sans vote par l'Assemblée nationale, le Premier ministre peut engager la responsabilité du Gouvernement en activant l'article 49.3 de la Constitution. Le projet de loi est alors considéré comme adopté si une motion de censure contre le Gouvernement n'est pas votée par l'Assemblée nationale. À l'inverse, si une motion de censure est votée, le Gouvernement est renversé et le texte rejeté.

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Le Gouvernement peut-il intervenir auprès du Conseil constitutionnel ?

Le Premier ministre peut saisir le Conseil constitutionnel dans le cadre du contrôle de constitutionnalité ou contrôle de la répartition des compétences entre pouvoir exécutif et pouvoir législatif.

Saisines à l'initiative du Gouvernement (articles 34, 37, 54 et 61 de la Constitution)

Le Premier ministre peut saisir le Conseil constitutionnel afin qu’il vérifie qu’un texte émanant du Parlement ne relève pas du domaine réglementaire. En effet, la Constitution a défini ce qui relève du domaine de la loi, attribué au Parlement (art.34), et ce qui est du domaine du règlement (art.37), qui relève de l’exécutif. En conséquence, un texte émanant du Parlement, mais reconnu par le Conseil constitutionnel comme appartenant au domaine du règlement, peut alors être modifié par le Gouvernement par voie de décret.

Le Premier ministre fait aussi partie des autorités pouvant saisir le Conseil constitutionnel afin qu’il vérifie la constitutionnalité d’une loi ou des engagements internationaux (Art.54 et Art.61).


L'initiative gouvernementale dans le processus législatif : le rôle du SGG

Par ailleurs, le rôle du Gouvernement est souvent important lors du déroulement de la procédure de contrôle de constitutionnalité devant le Conseil constitutionnel. En effet, la défense de la loi votée, mais non encore promulguée, incombe dans la majorité des cas au Gouvernement et plus précisément au Secrétariat général du Gouvernement. Cela s’explique par le fait que la très grande majorité des lois (environ 90%) est d’origine gouvernementale.

La défense présentée par le Gouvernement, comme les textes des saisines, sont publiés au Journal officiel. Cette publication permet d’éclairer la décision du Conseil constitutionnel, en montrant quels étaient très précisément les arguments échangés durant la procédure.
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Quel est le rôle du Conseil d’État auprès du Gouvernement ?
Le Conseil d’État, juridiction suprême de l'ordre administratif, joue un rôle de conseiller du Gouvernement.


Saisine obligatoire

Le Conseil d'État est obligatoirement saisi et donne un avis :
  • sur tous les projets de loi avant leur dépôt sur le Bureau des assemblées (art. 39) ;
  • sur les projets d’ordonnances (art. 38) ;
  • sur de nombreux textes réglementaires (ex : décrets).
Il s’agit d’un examen portant sur le droit, la forme et l’opportunité du texte. Dans la pratique, depuis 2015, tous les avis donnés par le Conseil d’État sur des projets de lois sont rendus publics.

D'un point de vue juridique, le Conseil d’État vérifie que le texte n’est pas contraire à une norme européenne et tente de prévenir les éventuelles inconstitutionnalités susceptibles d’être relevées par le Conseil constitutionnel.

D'un point de vue formel, il peut également proposer une rédaction plus cohérente ou plus claire du texte. Enfin, il peut attirer l’attention du Gouvernement sur l’opportunité ou non du texte dont il est saisi. Il ne s’agit pas d’opportunité politique, mais de l’opportunité au regard de critères comme la cohérence avec d’autres textes juridiques ou le contexte financier de l’action publique.

Le Gouvernement n’est pas tenu de suivre l’avis du Conseil d’État, mais la tradition veut qu’il en tienne compte. S’agissant des décrets, pour certains d’entre eux (dits "décrets en Conseil d’État"), le Gouvernement ne peut édicter que le texte adopté par le Conseil d’État ou le projet qu’il lui a soumis.


Saisine facultative

Par ailleurs, et de manière facultative, le Conseil d’État peut conseiller le Gouvernement, après avoir été saisi par lui, sur tout sujet posant problème. Il rendra alors un avis longuement motivé qui doit pouvoir éclairer le Gouvernement. Un exemple célèbre remonte à l’année 1989, lorsque le ministre de l’Éducation nationale décida de saisir le Conseil d’État à propos de la question dite du "foulard islamique", et plus largement sur la compatibilité entre le principe de laïcité et l’expression de leur choix religieux par les élèves.

Les avis donnés au Gouvernement sont alors secrets, sauf si le Gouvernement en décide autrement.

Le Conseil d’État peut aussi, de lui-même, attirer l’attention du Gouvernement sur des réformes lui paraissant conformes à l’intérêt général.

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