Ce mercredi 27 mars, près de deux mois après les députés, les sénateurs ont à leur tour voté en faveur de la création d’un délit d’homicide routier, qui sera constitué en cas d’accident mortel causé par un automobiliste à la suite d’une conduite délibérément à risque : état d’ivresse, prise de drogues ou encore conduite sans permis. Une étape supplémentaire dans la longue et balbutiante histoire de la sécurité routière en France, depuis la création du Code de la route, en 1921. Retour sur les évolutions en France de ces cinquante dernières années.
1972 : Un décret instituant un comité interministériel de la sécurité routière
Jacques Chaban-Delmas, alors Premier ministre, déclarait en 1969, comme le rappelle les archives du Monde , que « la maladie de la route est devenue aujourd’hui un véritable fléau national. » Et d’ajouter : « Cela ne doit pas susciter chez nous une attitude passive d’acceptation désespérée, mais la volonté d’agir vite. » Trois ans plus tard, en juillet 1971, il lance la création du comité interministériel de la sécurité routière ainsi que la nomination d’un délégué interministériel.
Le début des années 1970 marque ainsi en France un tournant dans les politiques de sécurité routière : 1972 est une année noire ; 16 610 personnes sont tuées cette année-là sur les routes de France, une mortalité alors jamais atteinte. En cause, notamment, la vitesse, l’alcool, mais également le nombre de véhicules en circulation en France. En 1950, 1,5 million de véhicules particuliers étaient en circulation en France. Vingt ans plus tard, dans l’Hexagone, on en dénombre douze millions.
1973 : Le port de la ceinture devient obligatoire sous certaines conditions
Le 17 mai 1973, une action coup de poing a lieu pour alerter l’opinion publique sur la mortalité routière. Durant l’opération « Mazamet, ville morte », les 16 610 habitants de cette ville située dans le Tarn, comme les 16 610 personnes tuées sur les routes l’année précédente, s’allongent par terre, comme morts. Les photos de l’événement font le tour de la presse.
De nouvelles mesures sont prises. Le port obligatoire de la ceinture de sécurité est acté en 1973, mais sous certaines conditions seulement : en dehors des agglomérations, et seulement pour les passagers situés à l’avant du véhicule. Le port du casque pour tous les usagers de motocyclettes (en et hors agglomération) et les conducteurs de vélomoteurs (hors agglomération) est également rendu obligatoire.
L’année suivante, en 1974, les limites de vitesses sont de nouveau abaissées. Désormais, les Français ne doivent pas dépasser 130 km/h sur les autoroutes, 110 km/h sur les voies expresses à 2 x 2 voies, et 90 km/h sur les routes.
Des actions de communication ponctuent la décennie. L’un des slogans, « Boire ou conduire, il faut choisir », est encore connu aujourd’hui.
1982 : Le drame de Beaune marque les esprits
1982 marque un nouveau tournant dans l’évolution de la sécurité routière. Durant la nuit du 31 juillet au 1er août, un gravissime accident survient sur l’autoroute A6, à hauteur de Beaune (Côte-d’Or). Deux autocars, partis de Crépy-en-Valois (Oise), transportant des enfants et des adolescents roulent vers la Savoie pour un voyage pour une colonie de vacances. Un carambolage survient, provoquant l’embrasement de quatre voitures et des deux bus. Dans l’un des autocars, 44 enfants restent piégées, ainsi que quatre adultes. Au total, 53 personnes perdront la vie cette nuit-là, dont 46 enfants.
Suite au drame, qui marque durablement l’opinion publique, le gouvernement de Pierre Mauroy, et plus particulièrement Charles Fiterman, alors ministre des Transports, décide d’agir. Désormais, les transports d’enfants en car durant les chassés-croisés estivaux sont interdits. La vitesse maximale des cars, par temps de pluie, est abaissée à 110 km/h. En 1983, la loi fixe à 0,80 g/l de sang ou 0,40 mg/l d’air expiré le taux maximum d’alcool autorisé pour la conduite automobile, au lieu de 1,20 g/l de sang jusqu’alors.
Ce mercredi 27 mars, près de deux mois après les députés, les sénateurs ont à leur tour voté en faveur de la création d’un délit d’homicide routier, qui sera constitué en cas d’accident mortel causé par un automobiliste à la suite d’une conduite délibérément à risque : état d’ivresse, prise de drogues ou encore conduite sans permis. Une étape supplémentaire dans la longue et balbutiante histoire de la sécurité routière en France, depuis la création du Code de la route, en 1921. Retour sur les évolutions en France de ces cinquante dernières années.
1972 : Un décret instituant un comité interministériel de la sécurité routière
Jacques Chaban-Delmas, alors Premier ministre, déclarait en 1969, comme le rappelle les archives du Monde , que « la maladie de la route est devenue aujourd’hui un véritable fléau national. » Et d’ajouter : « Cela ne doit pas susciter chez nous une attitude passive d’acceptation désespérée, mais la volonté d’agir vite. » Trois ans plus tard, en juillet 1971, il lance la création du comité interministériel de la sécurité routière ainsi que la nomination d’un délégué interministériel.
Lire aussi : Il y a cinquante ans, les routes de l’Ouest tuaient six fois par jour
Le début des années 1970 marque ainsi en France un tournant dans les politiques de sécurité routière : 1972 est une année noire ; 16 610 personnes sont tuées cette année-là sur les routes de France, une mortalité alors jamais atteinte. En cause, notamment, la vitesse, l’alcool, mais également le nombre de véhicules en circulation en France. En 1950, 1,5 million de véhicules particuliers étaient en circulation en France. Vingt ans plus tard, dans l’Hexagone, on en dénombre douze millions.
1973 : Le port de la ceinture devient obligatoire sous certaines conditions
Le 17 mai 1973, une action coup de poing a lieu pour alerter l’opinion publique sur la mortalité routière. Durant l’opération « Mazamet, ville morte », les 16 610 habitants de cette ville située dans le Tarn, comme les 16 610 personnes tuées sur les routes l’année précédente, s’allongent par terre, comme morts. Les photos de l’événement font le tour de la presse.
La Une de Ouest-France le 18 mai 1973
La Une de Ouest-France le 18 mai 1973 | OUEST-FRANCE
De nouvelles mesures sont prises. Le port obligatoire de la ceinture de sécurité est acté en 1973, mais sous certaines conditions seulement : en dehors des agglomérations, et seulement pour les passagers situés à l’avant du véhicule. Le port du casque pour tous les usagers de motocyclettes (en et hors agglomération) et les conducteurs de vélomoteurs (hors agglomération) est également rendu obligatoire.
L’année suivante, en 1974, les limites de vitesses sont de nouveau abaissées. Désormais, les Français ne doivent pas dépasser 130 km/h sur les autoroutes, 110 km/h sur les voies expresses à 2 x 2 voies, et 90 km/h sur les routes.
Des actions de communication ponctuent la décennie. L’un des slogans, « Boire ou conduire, il faut choisir », est encore connu aujourd’hui.
Lire aussi : Prévention. Il y a 45 ans, la sécurité routière prenait un grand virage
1982 : Le drame de Beaune marque les esprits
1982 marque un nouveau tournant dans l’évolution de la sécurité routière. Durant la nuit du 31 juillet au 1er août, un gravissime accident survient sur l’autoroute A6, à hauteur de Beaune (Côte-d’Or). Deux autocars, partis de Crépy-en-Valois (Oise), transportant des enfants et des adolescents roulent vers la Savoie pour un voyage pour une colonie de vacances. Un carambolage survient, provoquant l’embrasement de quatre voitures et des deux bus. Dans l’un des autocars, 44 enfants restent piégées, ainsi que quatre adultes. Au total, 53 personnes perdront la vie cette nuit-là, dont 46 enfants.
Suite au drame, qui marque durablement l’opinion publique, le gouvernement de Pierre Mauroy, et plus particulièrement Charles Fiterman, alors ministre des Transports, décide d’agir. Désormais, les transports d’enfants en car durant les chassés-croisés estivaux sont interdits. La vitesse maximale des cars, par temps de pluie, est abaissée à 110 km/h. En 1983, la loi fixe à 0,80 g/l de sang ou 0,40 mg/l d’air expiré le taux maximum d’alcool autorisé pour la conduite automobile, au lieu de 1,20 g/l de sang jusqu’alors.
1992 : Le permis à point fait son apparition
À l’orée des années des années 90, trois ans après la rédaction du livre blanc de la sécurité routière, qui préconisait sa création, et après des années de débat – la mesure étant jugée impopulaire –, le permis tel que nous le connaissons aujourd’hui apparaît dans le quotidien des Français. Le 1er juillet, le permis à point entre en vigueur. Désormais, chaque conducteur dispose d’un capital de six points, qui se réduit s’il commet des infractions routières. Il perd, par exemple, deux points pour un excès de vitesse ou le franchissement d’une ligne blanche.
Son application ne fait pas l’unanimité. Les motards se mobilisent et les chauffeurs routiers sont alors en première ligne. Au mois de juin, de nombreuses actions sont menées. Ouest-France rapporte dans ses colonnes de nombreux barrages routiers mis en place pour protester contre le permis à point, notamment à Donges (Loire-Atlantique), où une grève des routiers-citerniers s’installe.
Finalement, pour endiguer la colère, le gouvernement lâche du lest : chaque conducteur disposera de douze points.
2003 : Les premiers radars automatiques font leur arrivée
En 2002, Jacques Chirac serre la vis. Lors de la traditionnelle interview du 14 juillet, il place la sécurité routière parmi ses priorités : elle fait partie des chantiers de son nouveau quinquennat. Cette même année, l’amnistie présidentielle, qui consistait à oublier les infractions qui avaient été commises dans les quelques mois qui précèdent l’élection du président de la république pour les délits routiers est particulièrement durcie. Désormais, seules les infractions au stationnement sont pardonnées. Les contrôles de vitesses et d’alcoolémie sont également accrus.
Le 27 octobre 2003, le premier radar français est inauguré à Ville-du-Bois (Essonne). La généralisation du dispositif hérisse les poils de nombreux automobilistes.
La grogne se retrouve dans le courrier des lecteurs de Ouest-France. « Dame, c’est ça le progrès. Faut surtout pas l’arrêter : la Prévention routière se frotte les mains, le ministre des Transports jubile et s’enthousiasme à en avaler son micro… et l’argent entre dans les caisses de l’État. Et nous, pauvres de nous, on va payer au nom de quelques inconscients (peut-être impunis !) », nous écrivait notamment Marie-Claude, une lectrice nantaise, le 6 décembre, qui pointait de nombreuses incohérences dans les délits relevés par les radars. Les détracteurs du dispositif accusent l’état de viser le portefeuille des Français. D’autres se plaignent d’une atteinte à la liberté, comme le montre ce reportage de France 2 le jour de l’installation des premiers radars automatiques :
Mais la mesure semble fonctionner : en 2002, 7 242 avaient perdu la vie sur les routes en France. En 2003, le bilan descend à 5 732 morts. Le dispositif se généralise : dès avril 2004, 70 radars fixes sont déployés sur tout le territoire pour atteindre 2 173 au 1er février 2013. En 2024, hors zones urbaines, 3 560 radars actifs sont déployés sur le territoire français.
2018 : limitation à 80 km/h sur les routes bidirectionnelles
Après une baisse des morts sur la route dans les années 90, la mortalité sur les routes en France marque le pas dans les années 2010, stagnant entre les 3 000 et les 4 000 morts par an. Pour tenter d’enrayer cette funeste dynamique, le gouvernement annonce en janvier 2018 l’abaissement à 80 km/h de la vitesse maximale sur 400 000 kilomètres de routes secondaires. Le but : sauver entre 200 et 400 vies par an.
« Je refuse de considérer (la hausse du nombre de morts) comme une fatalité », déclare le Premier ministre Édouard Philippe au JDD . « Si pour sauver des vies, il faut être impopulaire, j’accepte de l’être. » Mais la mesure est impopulaire. Ses détracteurs accusent notamment le gouvernement de créer un fossé entre urbains et ruraux. Elle est l’une des raisons de la colère du mouvement des Gilets jaunes, qui explose en France à l’automne de cette même année.
En mai 2019, Édouard Philippe fait machine arrière, donnant la possibilité de relever localement de 80 km/h à 90 km/h la limitation de vitesse pour certaines routes départementales. En 2022, 45 des 96 départements concernés par le décret étaient repassés à une vitesse maximale de 90 km/h sur les routes secondaires.
2024 : La création de l’homicide routier
Nouvelle étape dans l’évolution de la sécurité en France. Jusqu’à présent, le Code pénal prévoit des « homicides involontaires aggravés » dans le cas où un automobiliste, sous l’empire de la drogue ou de l’alcool, provoque un accident mortel. Une qualification qui ne convainc pas certains, qui souhaitent modifier le Code pénal. Yannick Alléno, chef étoilé, a fait de la reconnaissance de l’homicide routier son cheval de bataille depuis la mort de son fils, Antoine, percuté à l’âge de 22 ans par un chauffard.
Réclamée par les associations de victimes et portée de façon transpartisane au Parlement, cette nouvelle dénomination a une valeur surtout symbolique et avait été soutenue par le gouvernement après l’accident provoqué par l’humoriste Pierre Palmade le 10 février 2023, qui avait consommé différentes drogues. Une femme avait perdu son enfant lors du choc.
Pour certains, cette mesure n’est que symbolique. Car en cas d’accident mortel, les peines maximales restent de sept ans de prison et 100 000 € d’amende s’il y a une seule circonstance aggravante et de 10 ans de prison et 150 000 € d’amende en cas de pluralité de circonstances aggravantes, note le gouvernement.
Les parlementaires ajoutent dans la loi de nouvelles circonstances aggravantes : non-assistance à personne en danger, utilisation par le conducteur d’écouteurs ou de téléphone à la main, consommation volontaire de façon détournée ou manifestement excessive de substances psychoactives, refus d’obtempérer et participation à un rodéo urbain.
Et dans ces prochaines années ?
Un sujet reste encore sur la table : celui d’une visite médicale obligatoire tous les quinze ans pour les conducteurs. La mesure défendue par l’eurodéputée écologiste française Karima Delli, présidente de la commission Transports au Parlement européen, a été rejetée au Parlement européen en février. Cette proposition, majoritairement défendue par la gauche, avait provoqué la crispation chez les élus de droite, qui dénonçait « une discrimination injuste contre les jeunes et les conducteurs âgés. » Karma Deli avait noté qu’une majorité des élus français au Parlement européen avaient voté en faveur du projet. « J’invite donc la France à le faire » , a-t-elle déclaré.